Depuis quelques jours, j’ai des images en tête : La
petite Yéménite de 8 ans décédée au courant de sa nuit de noces. Les petits et grands enfants syriens victimes des armes chimiques. Le petit chinois dont les yeux ont été
arrachés par une femme démente. Depuis quelques jours, j’ai pas le moral. Et,
je me demande pourquoi. Comment voulez-vous. Je suis pas fière de notre monde. Il
se fait mal là où ça fait le plus mal. Il n’aime pas ses enfants. Le monde il
est pas beau. Parfois oui, mais en ce moment, je broie son noir. Pourquoi il
fait mal à ses enfants? Pourquoi il fait mal, tout simplement? Naître pour
martyriser et tuer, c’est possible? Mais, à quoi ça sert au juste? À procurer
un sentiment de béatitude? Je ne comprends pas en quoi faire le mal, fait du
bien. C’est un principe que je ne m’explique pas. Comme la plupart des gens
d’ailleurs. Enfin, j’ose croire. Et, le mal, ce mal, le monde ne le fait pas
qu’au-travers des actes aussi extrêmes. Il le
répand jour après jour autour de lui. Sans vraiment s’en rendre compte. Enfin,
j’ose croire.
Quand on lui coupe la route, il lui en veut à mort à ce
connard dans l’autre voiture. Ça vient le chercher au plus profond de ses
entrailles et il serait capable de la pire vengeance si ce n’était pas du fait
que rouler sur ce connard pourrait endommager sa carrosserie. C’est de la haine
profonde, pure et viscérale. Tout le monde a une histoire du genre à raconter
et quand il s’y met, ça provoque tout un tollé. Parce que tout le monde a déjà voulu
tuer un cave qui l’a dépassé par la droite. Au lieu de ça, le cave s’est vu
recevoir un doigt d’honneur. Moins dommageable, mais tout aussi porteur
d’agressivité.
Pendant ce temps, nos enfants regardent.
Le monde n’aime pas qu’on le contrarie. Si le voisin a le
malheur d’avoir une opinion divergente de la sienne, il l’insulte :
« Ta mère aurait dû avorter! », « T’es une lopette, tu devrais
te suicider! ». Ça arrive chaque jour sur les réseaux sociaux. Le monde ne
défend plus ses idées, il traite les autres de tous les noms. Puis, le monde il
est content de tirer sur tout ce qui ose parler. C’est si valorisant d’intimider
autrui et ce n’est pas si grave puisqu’il y a un écran pour désamorcer
les préjugés.
Pendant ce temps, nos enfants voient.
J’ai vu le monde s’enflammer pour une partie de hockey de
niveau atome. Atome je vous dis! Ils ont à peine dix ans et déjà on leur met
autant de pression qu'en subit un urgentologue ». Heille le
monde, vos jeunes ne sauvent pas des vies, ils s’amusent! Des batailles de
parents dans les estrades. Ce n’est pas une légende, je l’ai vu de mes yeux vu.
Je suis sortie de l’aréna aussi vite que j’y suis entrée. J’ai eu peur pour ma
vie. Sérieusement. Pathétique…
Pendant ce temps, nos enfants observent.
Mon fils est souvent sur le gun, comme on dit. Dès que ça ne
marche pas comme il veut, il s’énerve. Il soupire. Il se fâche. Il réplique. Il
claque la porte. On dirait qu’il m’en veut. C’est dû à quoi? Son caractère ou
son éducation? Je me permets de me poser la question, car on dit que les
enfants apprennent par l’exemple. Lui aurais-je inculqué cette attitude caractérielle?
Le monde m’aurait-il disposé à le faire? Ai-je été entraînée dans le tourbillon
du ressentiment? Je fais de mon mieux, mais si ce mieux avait été abreuvé de
fiel?
Je me mets en doute. Je mets le monde en doute.
S’injurier, se chamailler, s’impatienter, s’envoyer paître peuvent
paraître bien loin du Yémen, de la Syrie ou de la Chine. Pourtant, il n’y a pas
de frontière au mal. Ouvrez la brèche de la haine, il s'y infiltrera. Et, le
pire, c’est qu’il le fera de manière insidieuse. S’entretenir dans un
micro-climat de hargne, n’est pas peu banal. Je pourrais être en train de
préparer un futur enragé. Le monde pourrait-être en train de préparer de futurs
enragés.
Faudrait se conscientiser un peu mieux. En tous les cas, il me semble.
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